Ce 10 novembre [D’une autre main : 1856]
Mon Cher Ami,
Je ne puis résister au désir de vous exprimer l'indignation profonde que me causent les attaques brutales et injustes dont vous êtes l'objet de la part de la presse anglaise.
Je ne m'en console qu'en songeant que votre long séjour dans ce pays-ci vous a accoutumé à mépriser les misérables de qui partent ces infâmes accusations.
Du reste vous avez vu pendant la guerre presque tous ceux qui en ont eu la direction, les hommes les plus honnêtes, les vieux militaires les plus distingués être en but à toutes les calomnies de la part des mêmes gens. Vous et Morny paraissez leur avoir inspiré une haine toute particulière. Du reste il faut le dire lorsqu'on ne partage pas toutes les passions, tous les préjugés de ce pays-ci et de son gouvernement, on est regardé comme ... et l'on est l'objet de l'hostilité générale. Je ne parle pas d'autres chagrins que les journaux prétendent que vous avez eus, parce que j'ignore quel fondement ont ces bruits. S'ils sont vrais, croyez aussi que j'y prends une part bien vive. Dans leur diatribe les journaux anglais ont bien voulu faire une exception en faveur de l'Empereur et j'en serais bien aise si je ne croyais que ce qu'il y aurait de plus fâcheux pour lui serait d'être accusé en France d'être sous le joug de l'Angleterre. C'est une disposition qu'on n'a jamais pardonné en France.
Je ne vous ai jamais remercié de votre dépêche télégraphique au  sujet de Morny et de la nomination de Rochegude à Florence, mais je n'en ai pas été moins touché.
Faites agréer tous mes hommages à Madame Walewska et croyez, mon cher Comte, à toute l'amitié que je vous ai vouée.