Paris 13 janvier 1863

 

 

Mon cher Comte,

Vous avez bien voulu me dire hier que l'Impératrice était mécontente de moi, à propos de la nomination de l'Archevêque de Paris et vous avez été témoin de mon étonnement car je cherche encore en quoi j'ai pu déplaire à sa Majesté.

Serait-ce à cause du choix de Mgr Darboy mais outre que ce choix a été mûrement étudié par l'Empereur et discuté en conseil je puis affirmer que nul dans l'épiscopat français ne sera ni plus sage ni plus modeste ni plus dévoué à la bonne et sincère alliance de l'Eglise et de l'Etat. J'ai désiré de toute mon âme je l'avoue un prélat ennemi des excès et des agitations fidèle à l'Empereur et à la France aimé estimé du Cardinal.... et qui bientôt je l'espère aura l'approbation générale.

Assurément ce n'est pas de ce côté que j'ai pu déplaire à l'Impératrice.

Serait-ce parce qu'on na pas adopté Mr l'Abbé Deguerry?

Mais cette candidature inattendue ne m'a été révélée par l'Empereur que la veille même du conseil et j'ai du dire loyalement à l'Empereur que je ne supposais pas au digne curé de la Madeleine la pensée d'accepter l'Archevêché de Paris après avoir refusé l'Evêché de Marseille.

Je lui ai dit encore ce que j'ai répété le lendemain devant le conseil savoir que très charitable actif tolérant spirituel l'abbé Deguerry était un excellent curé de bonnes oeuvres et de dévouement paroissial mais qu'il avait avec une imagination assez impressionnable peu de fermeté de caractère et de résolution dans les idées. Ses oscillations bien connues lors de sa nomination à Marseille sont la preuve de cela.

Voilà pour le devoir du ministre devant dire sincèrement ce qu'il pense et ce qu'il fait. mais comment mon cher Comte me douter que je pouvais ainsi causer le moindre déplaisir à l'Impératrice. est-ce de près ou de loin directement ou indirectement j'ai connu les intentions ou les désirs.

Le public jase de tout et si j'avais du tenir compte des bruits qui l'agitaient j'aurais du supposer que l'Impératrice inclinait plutôt vers l'Archevêque de Bourges que j'ai montré à l'Empereur comme pouvant devenir plus tard un grand aumônier ou son premier aumônier dès à présent. Mais je l'avoue en toute humilité j'ai vu le nom de M. Deguerry subitement prononcé bien plutôt une satisfaction donnée à la position de cet ecclésiastique qu'une candidature sérieusement appuyée.

Le bon sens le devoir le respect indiquent assez ce que j'aurais fait si j'avais pu prévoir le déplaisir qui m'afflige profondément.

Certes j'aurais supplié l'Impératrice de m'accorder une audience dans laquelle je lui aurais respectueusement soumis mes appréciations.

Voilà toute la vérité mon cher Comte.

Je voulais la dire hier soir à l'Impératrice mais ma timidité et ma gaucherie en face de notre pourtant si gracieuse souveraine m'en ont empêché.

Ceci est encore très vrai. J'ai vis à vis de L'Impératrice si bonne et si accueillante une timidité une réserve révérencielle qui ne nuisent en rien au loyal et profond dévouement que j'ai pour sa Majesté.

Vous savez mieux que personne mon cher Comte, la sincérité et la pureté de mes sentiments pour la dynastie impériale.

Après l'Empereur que Dieu nous garde longtemps je ne connais que l'Impératrice et leur fils et je ne suis pas de ceux qui se ..toutes les portes et qui...en flattant.

Si des jours de danger venaient j'en prendrais énergiquement ma part au nom du droit et de la fidélité.

Je suis donc chagrin attristé d'avoir pu contre toute intention causé la moindre contrariété à l'Impératrice.

Si elle estime dans un homme de cœur les sentiments de respect et de dévouement qui lui sont dus, Sa Majesté saura me pardonner aisément et je serai bien heureux le jour où je pourrai croire qu'il en est ainsi. mes efforts les plus constants ont tendu et tendront toujours vers ce but c'est mon plus vif désir et le premier de mes devoirs.

Veuillez agréer mon cher Comte l'expression de mes sentiments dévoués.