14 Mai 1855

Mon cher Walewski,

Je vous envoie la copie d'une dépêche de Canrobert conçue en ces termes: " Je confère avec les généraux anglais et turcs, rien encore de réglé à mon grand regret. Ambassadeur le premier attend de nouvelles instructions Les Piémontais ne seront pas réunis avant six jours. Les Anglais sont mécontents du contrordre pour l'opération de Kertch ce qui les rend difficiles. Crimée 12 dans la nuit.

Il se trouve dans cette dépêche chiffrée un paragraphe peu intelligible, néanmoins quand je rapproche le mot ambassadeur du voyage de Lord Stratford je crains bien que l'ambassadeur anglais ne soit allé en Crimée que pour mettre des bâtons dans les roues. Je vous prie de dire très sérieusement au gouvernement anglais qu'il ne faut pas retarder d'un moment l'ordre d'entrer en campagne si l'on veut obtenir un succès. D'un autre côté l'unité est impossible si les deux gouvernements ne s'entendent pas d'avance sur les ordres à transmettre. J'ai pour ma part donné l'exemple de la franchise en envoyant au ministère anglais la copie de toutes les instructions transmises par moi à Canrobert, je voudrais qu'il en fût de même de la part du gouvernement anglais. Veuillez insister sur l'expression de ce désir car jusqu'à présent rien ne m'a été communiqué.

Je vous envoie aussi une lettre du général Niel qu'il est bon de faire lire aux ministres anglais. Insistez bien sur ce point que si dans ce mois on n'a pas pris l'offensive contre les Russes il faut considérer la campagne comme manquée et la position de l'armée comme compromise.

Recevez, mon cher Walewski, l'assurance de ma sincère amitié.

Napoléon