Compiègne, le 8 novembre 1861

 

Mon cher Walewski,

Je désire vous entretenir d'une idée à laquelle j'attache une certaine importance.

L'impulsion que j'ai donnée à la recherche des antiquités fait que nous allons bientôt être encombrés d'objets. Mr Renan(?) entre autres me rapporte 60 caisses de Syrie, et je recevrai probablement beaucoup d'autres objets de Grèce et d'Asie, sans compter les antiquités gauloises qui sont en grand nombre. Je voudrais donc faire du château de Saint Germain un musée d'antiquités gauloises, romaines, phéniciennes et grecques. Dans ce but il faudrait reprendre le projet de restauration du château qu'on m'avait soumis il y a plusieurs années et qui doit être dans les archives du Ministère d'Etat. La restauration, je m'en souviens, devait coûter un million, mais la dépense pourrait être échelonnée sur un grand nombre d'années et ce qui m'importerait surtout pour le moment, ce serait de disposer les rez-de-chaussée de manière à recevoir les objets de grandes dimensions. Et cette appropriation n'exigerait pas une somme importante. Il va sans dire qu'on laisserait intacts les souvenirs historiques et principalement les chambres habitées par Jacques II.

J'ai réfléchi aussi sur mon projet de colonne pour perpétuer le souvenir de nos victoires et j'ai pensé que l'idée du préfet de la Seine était la meilleure. Elle consisterait en la modifiant en faire un seul arc de triomphe sur le rond point de la barrière du Trône. Cet arc de triomphe représenterait d'un côté la guerre d'Afrique, d'un autre les guerres d'Orient, d'Italie et de Chine. Il faudrait prendre comme modèle l'arc de triomphe de Constantin.

Je vous prie de penser à ces deux projets.

J'ai reçu une lettre de Poniatowski. La seule chose possible est une mission à Siam, parlez lui en ainsi qu'à Thouvenel.

Croyez à ma sincère amitié.

Napoléon