Mon cher Comte et ami,

L'Empereur m'a parlé du Conseil privé, comme étant toujours disposé à prendre un parti. Ce n'est que mardi prochain que l'affaire sera portée au Conseil. Je lui ai soumis quelques observations sur l'inconvénient de maintenir la peine de mort dans la catégorie des consultations obligatoires.  Il en a paru frappé et disposé à rendre l'avis facultatif. A mon sens, là serait l'utile et le vrai.

Tout se passe à Compiègne comme les années précédentes, c'est-à-dire avec une rare perfection d'hospitalité. Jamais l'Empereur et l'Impératrice ne m'avaient paru mieux portants et plus gais. Ce soir, la comédie française donne la nouvelle pièce de Monsieur Émile Augier. Ce dernier est ici.

Hier nous avons vu, sous nos yeux, prendre et tuer deux beaux cerfs. C'est la première fois que j'ai vu ce drame que j'ai trouvé très peu gai. Je n'ai pas pu m'empêcher de prendre parti pour les deux victimes contre les assassins. C'est bien arriéré ce que je dis là.

Mille amitiés

P. Magne

Compiègne, le 12 Novembre 1864