Villa Irène, Amphion près Evian, le 14 août

Mon cher Magne,

Je suis bien curieux de savoir quelle est la solution à laquelle vous avez cru un moment pour le Conseil privé. J'ai par devers moi quelque raison de penser que l'Empereur songe sérieusement à prendre un parti pour ce conseil si privé d'appui. Quant à Rouher et Lavalette, ils entraveront toute solution sortable, au moins tant qu'ils n'en feront pas partie ; et malgré toutes les raisons pour qu'il en soit autrement ils sont encore tout puissants!

Je sais pourtant de très bonne source que le faiseur des jeux s'inquiète un peu et qu'il balance sur le parti à prendre; il hésite entre ..., tenter la chance,  se cramponnant à son portefeuille pour fuir les élections, ou bien tenter un coup hardi pour escalader le ministère des Affaires Etrangères, ou enfin se ménager modestement l'ambassade de Londres. Il dit à ses affidés que lui et Rouher voudraient bien s'en aller, mais comment abandonner ce malheureux Empereur dans la situation difficile où il se trouve, et le laisser dans les mains des imbéciles dont il est entouré! (sic)

Le seul mérite de Lavalette lorsqu'il était dans la diplomatie c'était de savoir faire tourner les échecs du gouvernement à son profit personnel.

Il me semble qu'il n'a pas trop bien réussi à user dans ce sens du résultat des élections au conseil général car il me revient de tous côtés que c'est un échec pour le ministre plus encore que pour le gouvernement. Il est vrai qu'on a sans doute persuadé à sa Majesté que c'était une victoire pour les deux.

Je compte rester ici aussi longtemps que possible mais en tout cas je serai dans vos parages en octobre.

Quant à la politique extérieure personne n'y comprend goutte; les… s'attendent à un coup de théâtre; ce qu'il y a de certain pour le moment c'est que nous n'inspirons confiance à personne pas même à l'Autriche. On ne nous croit pas plus qu'on ne nous craint! Répondez-moi un mot pour me dire votre combinaison en ce qui concerne le Conseil privé.

Mille amitiés.