Mon Prince,

Me trouvant compris dans l'amnistie accordée aux polonais par S.A. Impériale après la révolution de Pologne, je m'adressai dès lors à l'ambassade de Russie à Paris pour savoir si quelques instructions y avaient été reçues concernant les démarches à faire pour les amnistiés ; rien de ce genre n'y était parvenu. Je me contentai alors de demander un passeport russe pour l'Angleterre où j'avais à me rendre pensant par cette demande témoigner suffisamment de mon désir de rentrer dans l'ordre.

J'obtins ce passeport et je me crus dès lors tout à fait en règle jusqu'à ce que des lettres de Pologne qui me parvinrent pendant mon séjour en Angleterre me firent naître le doute à ce sujet. Je m'empressai en conséquence d'adresser deux lettres au Prince de Lieven ; l'une en date du 2 août 1832, l'autre du 24 décembre de la même année, d'abord pour lui développer les raisons qui empêchaient que je ne fusse compris dans aucune des catégories d'exception à l'amnistie et pour lui demander de m'accorder un passeport pour me rendre en Pologne où des affaires d'intérêt m'appelaient. Le Prince voulut bien me répondre qu'il avait en l'appuyant fait passer ma demande à Votre Altesse ; jusqu'à ce jour je n'y ai eu aucune réponse.

J'ose donc prendre la liberté, monsieur le Maréchal, de m'adresser à vous directement pour prier Votre Altesse de me faire accorder un passeport pour aller passer trois mois en Pologne où des affaires d'intérêt réclament ma présence.

J'ose espérer, Mon Prince, que vous voudrez bien accueillir favorablement ma demande et je vous prie d'agréer d'avance l'expression de la reconnaissance avec laquelle j'ai l'honneur d'être de votre Altesse le très humble serviteur.