Bonne et admirable Rachel,

Je viens vous importuner et vous ennuyer. Cependant j'ai l'espoir que vous m'excuserez car je connais votre cœur il s'agit de faire du bien et de soulager des malheureux. D'abord une pauvre femme vous a présenté un mot de moi, donnez lui la moindre des choses et vous aurez bien placé votre argent. Ce n'est pas tout.. Vous êtes allée à Lyon vous devez avoir vu au petit théâtre un brave vieux comédien nommé Célécourt jouant les rôles de [...] jeune. Ce vieillard âgé de 70 ans, et qui avait amassé à peu près de quoi vivre au bout de 40 ans de travail vient de perdre tout mais tout ce qu'il possédait dans cette cruelle inondation. Lui et sa femme se sont sauvés par une fenêtre. Leur avoir était une maison que le Rhône a emportée avec tant d'autres. Il leur reste ce qu'ils avaient sur le corps. Ce vieillard connaissant plus particulièrement les artistes qui ont joué avec lui au petit théâtre s'est adressé à moi et à Achard pour que les camarades de Paris lui donnent une représentation. Nous avons fait toutes les démarches pour cela mais nous n'avons rien obtenu des directeurs. Il n'y a donc d'autre moyen de tirer ce pauvre artiste de la misère que de faire une souscription dans chaque théâtre. J'ai pensé que vous voudriez bien partager cette oeuvre charitable. Je vous fais passer une feuille que vous aurez la bonté de présenter à ces messieurs et dames du théâtre français. Monsieur Ligier à qui j'écris aussi a dû connaître ce brave home. Il pourra vous aider à faire cette bonne action.
Je vous demande mille pardons de toute la peine que je vais vous donner, mais je suis certain que vous m'en auriez voulu si je ne m'étais pas adressé à vous merci ! merci ! délicieuse Hermione.

Je suis en attendant le bonheur de vous voir votre très humble serviteur

Bouffé

Je suis très souffrant et forcé de garder le coin du feu sans quoi c'est de vive voix que j'aurais été vous adresser ma prière.

Mon compliment empressé à votre famille.

20 novembre 1840