[Papier à monogramme : « R »]

Pau jeudi six heures du soir

 

 

Je viens de la voir ma pauvre Rébecca et mon cœur s'est tenu pour ne pas se fondre en larmes. Nous avons même su si bien cacher notre douloureux étonnement qu'elle n'a pas été trop émue de nous voir tous dans sa chambre. Ah mon cher père comme elle souffre notre pauvre sœur ; elle ne tousse plus parce que le mal s'est déplacé mais le médecin dit qu'elle retoussera sans doute, il nous donne bien du courage pour l'avenir, mais l'état dans lequel je la trouve me fait un mal à ne pas dire.

Je me crois aussi assez souffrante et je veux sortir de cette capricieuse santé qui mine mon moral. Malheureusement le docteur Darralde est en ce moment à Paris, il ne revient dit-on ici que dans trois semaines. N'importe, je l'attendrai et dût-il m'engager à rester un an à Pau, je jure de ne plus quitter cette ville qu'alors qu'il m'assurera que ma vie se prolongera au delà de soixante ans.
J'ai bien souffert de mes douleurs de Paris à Pau, cela n'est pas à endurer davantage.

Maman va bien.

A revoir cher père je t'embrasse bien fort.

Rachel

13 avril 1854