Paris, le 20 octobre 1865

Mon cher Alexandre,

La nouvelle de la mort de mon pauvre frère t'est sans doute déjà parvenue et je ne doute pas qu'elle ne t'ait profondément peinée.

Bentivoglio venait d'arriver à la Branchoire avec sa femme pour se reposer des fatigues de Smyrne et il a assisté aux derniers jours de Rodolphe. Taddea a assez bien supporté cette nouvelle épreuve bien cruelle pour elle ; car mon frère lui avait servi de père comme tu le sais. Bentivoglio va retourner à son poste au mois de novembre il te demande à corps et à cris ; il m'a supplié de faire ajourner la nomination de l'élève consul remplaçant Monsieur Roustan, jusqu'à ce que j'ai reçu ta réponse à la présente lettre. Tu me dis que tu es dans les meilleurs termes avec ton chef ; dès lors je ne vois pas de bien bonnes raisons de te faire quitter Beyrouth, avant le printemps prochain, époque à laquelle tu viendras passer quelques mois avec nous. Cependant si tu avais un grand désir d'être nommé dès à présent à Smyrne comme après tout, je n'y verrais pas de grands inconvénients pour ta carrière, je ne m'y refuserais pas. Décide donc toi-même et réponds-moi au plus vite ; car on ne peut pas ajourner longtemps encore la nomination d'un élève consul à Smyrne. Pèse dans ta raison le pour et le contre, quant à moi, l'argument qui me paraîtrait décisif, ce serait de savoir lequel des deux climats, celui de Smyrne ou de Beyrouth, convient le mieux à ta santé ; ce n'est pas au moins que je m'inquiète de ta santé, en aucune façon. Mais comme tu m'écris que tu as constamment mal à l'estomac il se pourrait que le climat de Beyrouth ne te convienne pas autant que je l'avais espéré.

Adieu mon cher Alexandre je t'embrasse de tout coeur.