30 Juillet 1864

 

Ma chère Madame Walewska

 

Je ne sais si préoccupée justement comme vous l'êtes de la santé de Walewski, Fontainebleau vous manque beaucoup mais certes vous manquez beaucoup à Fontainebleau.

A la fournée italienne a succédé la fournée allemande sans préjudice de l'invitation envoyée à une partie des premiers invités à revenir. Plus étranger que jamais à ce monde où il entre pour moi trop de petites marionnettes, j'ai vraiment cherché autour de moi à qui communiquer mes pensées et mes observations quelquefois assez curieuses presque toujours tristes. C'est vous dire combien je regrette votre absence. N'êtes vous pas la seule personne avec laquelle je puisse avec une entière liberté et ce qui est plus rare et plus précieux avec une entière sécurité m'expliquer sur toutes choses. Je glane donc je moissonne en silence et dans le cas où vous viendrez du Mont Dore faire une visite à Vichy, je vous livrerai ma récolte. Venez vous serez les bien reçus j'en suis sûr. En attendant que Walewski se soigne avec persévérance, je vois avec peine s'éclaircir de jours en jours, les rangs des hommes sur le caractère et sur la sincérité desquels on puisse compter. Qu'il se conserve et se prépare pour l'imprévu, ajourner les questions n'est pas les résoudre et le moment venu il importe que ceux qui ont le plus droit à la confiance .....pour ceux dont l'ambition est l'unique mobile.
La santé de l'Empereur est bonne malgré le défaut d'exercice et une reprise de travail continu.

Quant à moi journellement pressé entre deux césars, je n'épaissis pas mais je me soutiens et n'ai pas à me plaindre semblable à ces vieux fiacres dont le numéro est effacé les panneaux fendus les roues déjetées mais qui roulent encore  un peu pourvu qu'on les prenne(?) à l'heure.

Adieu ma chère Mme Walewska mes amitiés à Walewski et à vous un inaltérable attachement.

Nous serons le 6 Juillet au soir à Vichy vous serez bien bonne de me donner des nouvelles du souffrant.